[Trame Yenepha] Événements joués

Explications : J'ai dit qu'en attendant le retour des nombreux absents je m'écartais de la trame Shuligan pour faire du rôleplay plus personnel et du coup, en parallèle à l'écriture de ma biographie (Qui d'ailleurs était aussi une trame jouée) je vais poster ici quelques échanges rp forum ou encore mails qui se déroulent actuellement. Pas tout, mais selon le feeling et l'envie de partager / faire lire. En vrac sans explications résumés ou je ne sais quoi, juste de quoi donner une idée des événements et découvrir un peu les personnages. (Oui les explications ça sera dans la biographie, un jour ! mais le rp en jeu est trop dense pour être récité dans son intégrité.)

On est donc dans le présent. Je fais ça parce que d'une comme ça je ne perds pas les textes, de deux ça me permet de présenter Lenna (ou d'autres) qui j'espère rejoindra la guilde à terme et de trois c'est toujours marrant de savoir ce qu'il se passe en rp en dehors de la guilde. Éventuellement ça peut aiguiller les autres sur comment s'intégrer.

Et je commence par un échange à trois voix, Svanrige, Lenna et Yenepha, (+ apparition de Sheorath sur la fin) qui a eu lieu.. la nuit du 26 au 27 !


Premier évènement - Visite Nocturne.


Personnages :


• Svanrige : Disciple d'Osamodas, Shuligan comploteur, il s'est retrouvé mêlé à de sinistres événements qui le dépassent par un coup du sort. Il loge dans une maison sur Brakmar aux frais de Yenepha. Il se plaint énormément de Lenna qu'il juge sotte et gourde mais dans le fond, il apprécie prendre soin d'elle. Les complications l'emmerdent, il aime bosser seul dans son coin, rester dans l'ombre, ne pas être dérangé.

• Lenna : Disciple de Sacrieur, elle dit avoir passé sa vie enfermée dans une prison. Naïve, on dirait un oiseau tombé du nid et la jeune femme de 20 ans a encore tout à découvrir. Seulement voilà elle semble posséder une sorte de double personnalité, violente, puissante et haineuse qui parfois prend le dessus en cas de confrontation. Yenepha s'intéresse à elle et elle a accepté de l'entraîner avec l'aide de Nanake et Svanrige. Lenna loge dans la même maison que Svanrige.

• Yenepha : Disciple de Crâ, membre du Conseil Shuligan, cheffe des assassins, elle s'est dernièrement radicalement écartée des affaires du Clan et ne remplit son devoir que mécaniquement et uniquement le strict nécessaire. Elle préfère rester isolée pour le moment malgré qu'elle ait accepté de s'occuper de Lenna, sans doute pour chasser la solitude, ou pour ne pas avoir à trop penser au reste.

• Sheorath : Disciple de Iop, il semble avoir un destin lié à celui de Clydhe et attend patiemment son retour. En attendant, il surveille Yenepha de près, de très près. Violent, implacable et glacial il sait soigner ses entrées et intervenir juste quand il le faut.

26.10.645 - tard dans la nuit.

Cette nuit Svanrige était rentré à pas d'heure sur Brakmar. C'était ça d'être le seul comploteur Shuligan encore sur pieds depuis la disparition de Stazia, l'obligation de s'occuper des stocks du Clan, de maintenir tout ce petit monde bordélique à flot et de donner un semblant d'organisation à cette bande de hérauts du chaos sans suite dans les idées. Un travail finalement très peu méritant à leurs yeux mais il ne s'en plaignait jamais. Il avait toujours fait ça, bosser dans son coin sans rien attendre de personne. Un habitué de l'ombre, c'est ce qu'il était. Une place peu convoitée mais qui lui sied à merveille.

Il monte à l'étage. Avec la fatigue il avait presque oublié la présence de Lenna. Elle dormait allongée sur le lit de la chambre à coucher et il ne retint pas son habituel soupir en la voyant. Il s'assied au bord sans la réveiller. Elle dirait qu'il avait encore l'air de tirer la gueule, qu'il était une fois de plus trop soucieux et qu'il ferait mieux de se détendre un peu mais il avait cet éternel pressentiment qui ne le quittait plus depuis qu'il avait vécu l'horreur entre ces mêmes quatre murs. Il avait tellement envie de s'enfuir, de renoncer à sa place, de recommencer ailleurs, loin, très loin. Et pourtant c'est le dos droit qu'il fixe devant lui, vers les escaliers. Non il ne bougerait pas. Il avait trop longtemps adopté la stratégie du déni et de la peur et à présent que ses petits soucis personnels s'étaient arrangés - grâce aux Shuligans - il prendrait soin de ne plus recommencer l'erreur et d'affronter les choses en face. Même si la chose en question ... le dépassait totalement.

Un bruit, un second. Quelque chose qui frotte en bas, sous le parquet, le plafond du salon ... ? Svanrige fronce les sourcils et ne quitte pas les escaliers des yeux. Autour de lui le décor se met à onduler. Les meubles perdent de leur opacité un à un et leurs contours se font lentement grignoter par une gomme invisible. La cuve de lave au milieu de la pièce se teinte d'un bleu cyan vif. De longs filets de sable doré s'écoulent ici et là le long des murs pour venir former de petits tas au sol. Les sons s'accentuent, la température ambiante se met à grimper en flèche, on meurt de chaud. Un sifflement désagréable cogne contre les tympans et le vacarme de l'étage du dessous devient anormal, ça résonne, ça continue de s'amplifier.

- Lenna... ? Lenna réveille toi putain !

Il avait la gorge sèche et commençait à avoir du mal à respirer. L'air était étouffant. Il se tourne vers elle pour la secouer mais se fige dans son élan, les yeux écarquillés, rivés vers le mur derrière la sacrieur.

- Oh mais merde ...

Il ne trouvait pas les mots. Ni à voix haute, ni dans son esprit embrumé par la chaleur maintenant insupportable. Il ne savait pas s'il devait trouver ça magnifique ou immonde, incroyable ou désastreux. Partagé entre l'effroi et une sincère admiration, c'était superbe et pourtant il voulait la voir disparaître à jamais.

- ... Yenepha ...

Elle était à quatre pattes sur le mur et ses cheveux bleus tombaient devant son visage jusqu'à celui de Lenna. Des runes cyan dansaient de mille feux le long de sa colonne qui continuait en une queue de vertèbres noircies dont la pointe aiguisée en lame grimpait jusqu'au plafond. Gigantesque. Une fine paire de cornes encadre son visage, sa chair parfois s'écarte et laisse place à des filaments de flammes qui courent et la parcourent. Elle relève la tête à son nom et son regard croise celui de l'osamodas. Une pupille dilatée à souhait au milieu d'un bain d'or, au fond, un feu presque blanc s'anime. Elle a gardé son visage de poupée, ce minois si gracile, elle est tellement belle alors comment ce degré d'hostilité ...

D'un geste vif il se saisit de l'une des chevilles de Lenna et la tire de toutes ses forces pour la traîner à lui et la réveiller.

- Allez remue toi espèce d'idi...

Sa phrase ne s'achève pas et sa voix se brise. Son regard se révulse tandis qu'il s'écroule au sol, la queue de la créature s'était déployée et en une fraction de seconde elle avait traversé son poitrail dans une giclée de sang. Pas un cri, ses forces s'étaient simplement dérobées.

Lenna dormait paisiblement à cette heure-ci, n'ayant pu lutter contre l'effet soporifique d'un matelas moelleux. Les journées étaient épuisantes avec l'entrainement qu'elle suivait, et du repos lui faisait le plus grand bien. Or cette nuit là, son sommeil fut troublé par un appel lointain, un appel auquel elle ne voulait porter attention, préférant de loin se reposer. Une main lui saisit la cheville brutalement, finissant de la ramener à la dure réalité. La jeune fille se redressa dans son lit et se frotta les yeux sans les ouvrir, agressée par la lumière environnante. Elle avait reconnu la voix de Svanrige.

- Svan t'abuses ... on s'entrainera demain, là je suis crevée ...

Ouverture des yeux. Ouverture sur un monde onirique, irréel, qui n'était pas le sien. Certains éléments du décor semblaient doués de vie tandis que d'autres mourraient à petit feu. Rêvait elle encore ? En tout cas cela y ressemblait bien. Une fois ses yeux habitués à son environnement, Lenna dirigea ses regard vers le sol et blêmit. Svan était allongé au sol, les paupières mi-closes transpercé par une sorte de queue. Du sang s'écoulait lentement de sa plaie béante, ce qui n'était pas bon signe.

Ses yeux se mirent à remonter lentement cette queue, comme si elle redoutait ce qui se trouvait au bout. Un mauvais pressentiment, étouffé par une curiosité dévorante. Mais toute course connait une fin, et celle-ci n'était pas agréable à regarder. Quelque chose était accrochée au mur, la tête tournée vers l'endroit où elle dormait il y a un instant. Des flammes s'échappaient de part et d'autre de son corps, et de jolis dessins parsemaient ce dernier. Mais comme un curieux mélange surréaliste, sa tête ne concordait pas avec le reste du corps. Ses traits étaient doux, et sa beauté suffisait à éclipser les flammes bleuâtres. Yenepha.

A la vue de son visage, Lenna se décrispa. Elle ne pouvait ... non elle ne devait avoir peur d'elle. Certes, elle n'était pas dans le meilleur des jours, mais ce n'était pas une raison pour la craindre.

La longue queue se retira du corps de Svanrige, provoquant par la même occasion une large giclée de sang. Elle devait s'occuper de lui en premier, sinon lui aussi risquait de passer une sale journée. Dictée par son instinct de Sacrieur, Lenna s'entailla profondément les deux poignets à l'aide de ses ongles. Elle s'agenouilla près du jeune homme et lui saisit les bras en fermant les yeux, lui transmettant par la même occasion sa force vitale. Décidément elle ne supportait vraiment pas la vue du sang. Ses tatouages s'illuminèrent légèrement pendant l'opération et, estimant qu'il survivrait, Lenna se releva et fit face à Yenepha. Elle fit un pas en sa direction et s'immobilisa. Nul mots ne furent prononcés. Cela aurait été bien inutile et elle le savait.

Suite de Yenepha

Je souffre continuellement. Une lente agonie qui me connaît comme une sœur et qui s'invite à toute heure pour une promenade main dans la main. Elle coule dans mes veines, hurle dans mon crâne et cogne dans ma poitrine. Je la crains et elle s'en amuse, elle le sait, elle est la seule à savoir aussi bien me hanter. J'ai mal d'être ce que je suis, un quelque chose qui n'est plus d'ici, plus la bienvenue, seule. Seule je ne l'ai jamais autant été. Je continue de grandir ou d'évoluer, mais aujourd'hui, où sont ceux qui devaient me guider ? Ceux qui disaient me comprendre, m'accepter, m'aimer. Éparpillés, disparus. Ma faute ? Probablement.

Je souffre continuellement mais je le fais en silence. Je me cache derrière des responsabilités, Clan à gérer, Clan à veiller, des desseins qui ne sont pas les miens mais dans un effort je m'y intéresse et je noie la vérité sous une fausse identité. Un rôle à jouer, mais au fil du temps il perd de sa saveur, de sa matière et de son efficacité. Les questions reviennent et m'obligent à me regarder. Combien de temps à ravaler mes douleurs et pourquoi, pour qui ? Qui aujourd'hui mérite mes sacrifices ? Qui les remarque ? Ce que je fais n'a plus aucun sens et j'avance dans le noir sur une terre qui peut-être n'a pas à être épargnée.

Je souffre de me retenir mais je souffrirais bien plus si tout devait éclater. Enchaînée, je l'ai toujours été d'une façon ou d'une autre. Là encore je sens le fer froid autour de ma gorge et alors que les doutes m'envahissent je me permets un écart de conduite. Un pas sur une pente glissante, la mienne, l'envie de destruction. Je brûle de mon propre Feu et je les déteste tous jusqu'au dernier. Je déteste ceux qui s'extasient, je déteste ceux qui me poussent vers l'Onirique, ceux qui me poussent vers la Réalité, ceux qui me retiennent, ceux qui disent vouloir ma liberté, ceux qui attendent que je me déchaîne, ceux qui me craignent, je les déteste tous mais surtout je me déteste moi.


Je souffre mais après tout, il n'y a pas de raison pour que je sois la seule.

Le silence s'était installé depuis de longues secondes chargées d'une tension palpable. La respiration de Svanrige était régulière mais il n'avait pas repris conscience. La queue glisse au sol et remonte le long du mur pour retourner dans le dos de Yenepha. Ses muscles se tendent et rapidement elle rampe jusqu'au plafond pour y disparaître...


Encore quelques secondes, puis une petite voix. Une mélodie doucereuse et des paroles à peine articulées aux sonorités étrangères. Les murs tombent un à un, les quatre vers l'extérieur, comme un vulgaire décor en carton. Le paysage s'efface emporté par des bourrasques d'air chaud, peu à peu il ne reste rien si ce n'est eux deux. Seuls au milieu de rien.



Une étendue lisse de sable sous leur pied, du sable encore du sable à perte de vue et une tempête qui soulève les dunes comme de vulgaires marionnettes. Les formes lointaines s'effritent pour se matérialiser à nouveau plus loin au gré d'un vent qui écrase tout autre son. Les vues sont troubles, gênées par la poussière.

Puis tout se fige dans les airs et les particules de sable se mettent à mollement flotter autour d'eux.. Juste le temps de l'attaque.


Yenepha réapparaît dans le dos de la jeune femme. Une main plaquée sur sa bouche et l'autre, enveloppée de flammes rouges, enfoncée jusque dans ses tripes. Une odeur de chair brûlée à retourner les estomacs se dégage tandis que les doigts poursuivent leur chemin. Le feu creuse, ronge, dévore et la main crève le ventre pour sortir de l'autre côté de la sacrieur. Sa queue s'enroule tout doucement autour d'elle comme un serpent. Elle se resserre, les os craquent et la peau brûle sur son passage.

Elle colle sa joue contre la sienne et ses ongles s'enfoncent autour de sa bouche. Devant elles la tempête a repris ses danses folles. Le ciel s'embrase et crache une fine pluie de lave qui achève en beauté cette course au martyr. Elle la tient toujours, les muscles de Lenna ne répondent plus et les seuls signaux qu'elle reçoit encore, ce sont ceux qui torturent chaque parcelle de son être. La main reste coincée et le Feu continue de se diffuser en elle. Lentement. De la fumée s'échappe du coin de ses orbites, de sa bouche et de ses narines. Des larmes de sang, un sang qui commence à bouillir. Elle convulse.


Un sursaut et Svanrige reprend ses esprits. Inutile de chercher à comprendre la situation, il agit à l'instinct et tend son bras pour enfoncer sa dague au-dessus du genoux de la créature qui pousse un cri et s'écarte de Lenna pour disparaître dans la tempête, leur laissant un instant de répit. Le manche de son arme tombe par terre dans sa fuite, cramé. Sans doute que la lame est déjà en train de fondre, ça ne l'éloignera pas longtemps.

Il rattrape la sacrieur brûlée et la couche sur le dos pour lui apporter les premiers soins largement insuffisants. Peine perdue, il lui gifle les joues et invoque son golem qui vient les protéger de la pluie.

- Faut qu'on se réveille Lenna.. faut qu'on se réveille.. reste avec moi tu entends !? On peut pas rester là ! ! Putain faut qu'on sorte !

Cette impression de chaleur ... elle s'amplifiait, elle la dévorait de l'intérieur ... La force même du feu, indomptable et sauvage, qui dévaste tout sur son passage ... Lenna pouvait sentir chaque parcelle de son corps se faire avaler par les flammes. Elle aurait aimé crier mais n'en avait plus la force. Et même si elle avait pu, qu'aurait elle dit ? Probablement qu'elle n'en voulait pas à Yenepha, mais étais-ce seulement vrai ?

Elle sentit un léger soulagement à la surface de son corps, quelqu'un devait lui apporter quelques soins. Mais ce n'était pas suffisant. On ne faisait que recoller du verre brisé, sans tenir compte des brèches à l'intérieur. Les yeux de Lenna se fermèrent peu à peu, signe de soumission à son sort. Le spectacle de ce ciel en feu s'effaçait peu à peu pour laisser place au vide. Elle était en train de tomber, sans jamais toucher le sol, et la chaleur extrême ressentit auparavant laissait place à un froid mordant. Elle en était persuadée maintenant, à le seconde où elle s'écraserait, c'en serait fini pour elle, c'en serait fini de la petite Lenna fragile et innocente. Elle devrait se retirer d'un monde qu'elle n'avait pas eue le temps de découvrir, devant courber l'échine sous le poids de règles qui lui échappait.

Une main la rattrapa au vol. Elle leva la tête et se vit comme dans un miroir. Ou plutôt une version plus terrifiante d'elle-même, qui n'inspirait certainement pas confiance. Ses yeux rouges reflétaient le mépris et la haine, et des tatouages démoniaques parcouraient tout son corps, envahissant jusqu'à son visage. Elle souleva Lenna.

La Sacrieuse rouvrit les yeux. Rouges cette fois. Le spectacle au-dehors n'avait pas changé, et la jeune femme ne put s'empêcher de trouver cela de toute beauté. Svanrige se tenait au-dessus d'elle, inquiet. Lenna venait de retrouver sa liberté, elle n'allait pas y renoncer à cause de cette gamine. Son corps était en morceau, et elle était incapable de se relever. Une quinte de toux la prit, et elle cracha un peu de sang. Juste ce geste lui donnait envie de mourir tant la douleur était intense. Il fallait s'en aller, et vite.

- Lenna ...

Encore un soupir mais cette fois-ci c'est du soulagement brut. Elle était dans un état lamentable et la simple vue de son corps ravagé lui tordait l'estomac. Il s'en voulait.

- Je t'avais dit.. de te casser de cet endroit.. On fait quoi maintenant !? Elle va jouer avec nous.. On n'a pas les moyens de calmer ses crises. On est sur son territoire, on voit pas à trois mètres devant nous avec cette tempête et tu peux même pas marcher.. putain on va crever là.

Il poursuit ses tentatives de soins et redouble d'efforts. Ses dons et les attributs de disciple de Sacrieur de Lenna opèrent et la chair carbonisée regagne une petite santé. La plaie de son ventre se referme à une lenteur désespérante et rien ne semble vouloir calmer la douleur.

- J'ai pas les compétences Lenna.. J'y arriverai pas...

Entre la panique et la peur il ne semblait pas même remarquer le changement de ses iris. Obnubilé par le désir de s'en sortir et le soulagement de la voir encore en respirer.

- Fallait que ça tombe sur nous deux hein. Non bah non ça pouvait pas être monsieur l'Archange gardien ou Clydhe le Cavalier né pour diriger la Chaos ni même Wolf avec sa palette de pouvoirs taillés exprès pour ce genre de situation. Non non, c'est Svanrige le comploteur qui capte absolument rien à tout ce qui touche Yenepha et Lenna qui galère pour se faire cuire un steak. Super, j'adore, si tu veux savoir je crois que je su...

Quelque chose tourne autour d'eux et le sable crisse dans les alentours, quelque part au milieu des rafales de vent. Le golem invoqué s'agite et se tient prêt à protéger son maître. Svanrige laisse sa phrase en suspens et écoute. Il a plutôt confiance en sa créature, comme les autres elle était constituée d'ombres et il savait par expérience que les coups de chaud et étincelles elle ne les sentait pas même passer. Il se permet un sourire encourageant alors qu'il reprend son calme.

- On va trouver une solution.

Agaçant. C'est le mot qui venait à l'esprit de Lenna quand elle écoutait Svanrige pleurer sur leur sort. Elle fit un énorme effort pour se relever, manquant de s'écraser au sol à nouveau à quelques reprises. Demander l'aide de Svan aurait été une humiliation, et elle aurait encore préféré crever là, dans ce désert apocalyptique. Une fois sur ses pieds, la jeune femme se tourna vers Svan :

- Arrêtes de chialer et cherchons plutôt un abri. J'ai pas l'intention de moisir ici, lui lança-t-elle sèchement.

Elle fixa l'horizon et ne vit que des dunes de sable à perte de vue. Par déduction, elle se doutait que ce n'était plus son monde mais celui de Yenepha. Une réalité qui n'était régie par aucune règle sinon les siennes, et dont on ne connaissait les limites. Lenna ne savait même pas si marcher les mènerait quelque part, mais il fallait essayer, ils n'avaient pas le choix.

La Sacrieuse commença à marcher, sans savoir vers où. Elle boitait dangereusement mais c'était le cadet de ses soucis. Elle fit volte-face et s'adressa à Svan :

- Si ta fameuse solution tu pouvais la trouver en marchant, ça m'arrangerait.  

Louée soit Sacrieuse, ses blessures la faisaient de moins en moins souffrir. D'ici quelques temps, elle serait apte à se battre. Avec ou sans son camarade de mésaventure.
Le climat était de moins en leur faveur, il fallait se hâter. Comment une pareille créature telle que Yenepha pouvait exister ? Cela dépassait tout entendement et elle n'avait jamais eue la patience de chercher à percer des secrets.

Son changement de comportement lui sautait enfin aux yeux, l'autre avait pris le dessus. Quoi de plus normal, si elle se montrait pour une petite confrontation à l'amiable avec Wolf elle avait intérêt à aussi débarquer dans ce merdier de l'infini. Dommage que ce changement était accompagné d'une bonne dose d'arrogance et de connerie, ce n'était clairement pas le lieu pour jouer les idiotes. Svanrige blasé hausse le ton pour se faire entendre au milieu de la tempête tandis que Lenna s'éloigne.

- Ah ouais ça y est t'es en mode "guerrière suprême" et du coup tu te casses avec ta confiance sous le bras et tes grands airs de gonzesse qui a la situa... !

Elle avait fait un pas de trop. Le sable s'écarte sous ses pieds et elle dégringole. L'Onirique se creuse, lui offre un joli passage étroit vers un bain de lave et tout se referme au-dessus d'elle. Une chute interminable dans une obscurité totale pendant qu'à la surface, Svanrige reste estomaqué la bouche grande ouverte, seul.

Des minutes entières qui tournent, inlassablement. Impossible pour elle de se retenir à quoique ce soit, les parois se dérobent sous ses doigts et le sable se donne des allures de verre glissant, aucune prise n'est permise. Le couloir se débouche enfin sur une salle circulaire immense au sol en fusion et alors qu'elle allait plonger dans les flammes, un îlot de roches noires pas plus large que sa silhouette se matérialise pour la réceptionner. Le choc est rude.

- Tu ne vas pas moisir ici. Rien, ne moisit jamais ici.

Yenepha se tient plus loin, le corps immergé de moitié dans la lave. Elle s'enfonce lentement sans la quitter des yeux jusqu'à complètement disparaître. Elle ne la ferait pas patienter, elle tenait toujours ses promesses et c'est dans un élan de pure bienveillance qu'elle la brûlerait sur place le plus rapidement possible. Elle saute, traverse de nouveau la lave dans le sens inverse et alors qu'elle est au-dessus de Lenna elle crache une véritable déflagration or et bleue dans sa direction. Aucune esquive autorisée, le torrent engloutit tout l'îlot qui éclate sur le coup sauf que ... Lenna n'était plus ici.


- Bonjour. Je n'ai pas apporté les croissants mais de toute façon je doute que mâcher ne te soit agréable dans ton état actuel.

Un rire froid et forcé résonne dans le crâne de Lenna alors qu'elle ouvre les yeux avec peine. Couchée sur le lit dans la chambre de Brakmar elle reprend difficilement ses esprits. L'impression de chaleur et d'étouffement se dissipe en douceur et il ne reste que ses blessures qui elles restent bien ancrées dans la réalité. Assis au pied du lit, un disciple de Iop aux cheveux blancs. Il ne la regarde pas, trop occupé à prendre le pouls de Svanrige toujours assoupi.

- Réveiller les morts ça me connaît mais quand ils sont trop éloignés l’exercice est délicat. Ah, il vit.

Une gifle puis un cri, Svanrige ouvre brusquement les yeux et tente de se protéger avec ses bras.

- Bonjour, juste à temps aussi ? J'en suis ravi.

Sans rien ajouter il se lève et les abandonne à leur réveil. Il n'a pas le temps, ni l'intérêt, il doit aller voir une autre personne à présent.


[Fin du premier échange]